L’Université d’Ottawa et l’Ambassade de France au Canada ont créé la Chaire de recherche en diplomatie scientifique afin de relever des défis uniques en matière de diplomatie scientifique. Patrick Fafard, chercheur au CÉPI et professeur à l’Université d’Ottawa, a été nommé titulaire de la chaire, aux côtés de Pascal Griset, codirecteur de l’École internationale de diplomatie scientifique et Professeur d’histoire contemporaine à la Sorbonne Université en France.

Qu’est-ce que la diplomatie scientifique ?

La diplomatie scientifique est un domaine hybride construit tout autant par les pratiques des acteurs que par les travaux théoriques menés par les chercheurs en sciences humaines et sociales. Cette hybridité concerne également les acteurs de ce domaine qui peuvent être simultanément ou bien successivement, des scientifiques engagés dans la diplomatie, des diplomates qui par leur retour d’expérience et leur réflexion apportent leur contribution à la conceptualisation du domaine, des chercheurs en sciences humaines et sociales qui adoptent comme « terrain » ces nouvelles pratiques.

L’Université d’Ottawa et l’Ambassade de France au Canada ont reconnu l’importance de ce domaine en créant une chaire qui sera occupée pendant les deux prochaines années par Pascal Griset et Patrick Fafard. Tous deux seront des chercheurs, s’efforçant de faire progresser la réflexion interdisciplinaire sur les politiques de santé dans leurs dimensions internationales et diplomatiques, et en quelque sorte des « diplomates scientifiques » favorisant le développement de relations scientifiques fécondes entre le Canada et la France. Leurs travaux seront menés en étroite collaboration avec Alexandra Gheciu, directrice du CÉPI.

Les experts

Spécialiste des politiques de santé publique et de gouvernance, le professeur Patrick Fafard met son expertise interdisciplinaire au service de ce vaste chantier. Au cours de sa longue carrière, il a notamment travaillé comme cadre supérieur dans l’administration publique et participé à un programme de recherche de longue durée visant à évaluer les structures de gouvernance en santé publique existantes et à trouver des façons de les améliorer. Aujourd’hui, le professeur Fafard travaille avec ses collègues du Global Strategy Lab pour trouver des solutions à un besoin urgent : celui de se doter de stratégies de gouvernance à l’échelle mondiale pour contrer la résistance aux antimicrobiens.

Pour sa part, le professeur Pascal Griset, historien émérite qui s’intéresse de près à l’histoire des technologies et des télécommunications, est une figure de proue dans le domaine de la diplomatie scientifique. Agissant comme codirecteur de l’École internationale de diplomatie scientifique, il mène des recherches sur tout le territoire européen. Son approche interdisciplinaire lui a permis de collaborer efficacement avec des spécialistes de divers domaines et, ainsi, d’enrichir la diplomatie scientifique.

L’étude de cette discipline pose des défis uniques. Elle implique notamment une approche multidisciplinaire et une collaboration étroite avec les responsables gouvernementaux de même qu’avec les praticiennes et praticiens du monde entier. Les professeurs Fafard et Griset détiennent l’expertise nécessaire pour aborder ces enjeux de front.

Surmonter les défis contemporains

Les chercheurs se pencheront sur deux études de cas probantes pour mieux comprendre la pratique de la diplomatie scientifique.

D’abord, ils examineront la façon dont la collaboration scientifique internationale pourrait transcender les frontières géopolitiques et renforcer la sécurité nationale et mondiale. Dans un contexte marqué par une escalade des conflits et une rupture de l’ordre international établi, ils évalueront la faisabilité d’un ambitieux projet : trouver une adéquation entre les idéaux scientifiques universels et les exigences en matière de sécurité nationale.

Ensuite, ils se pencheront sur la résistance aux antimicrobiens, un défi auquel tous les pays doivent impérativement s’attaquer. L’utilisation excessive d’antimicrobiens dans les soins de santé, l’agriculture et l’environnement a conduit au développement d’agents pathogènes résistants aux antimicrobiens, rendant inefficaces bon nombre de nos thérapies existantes. Le taux de mortalité annuel dû aux infections résistantes est en augmentation, tout comme les conséquences économiques et sociétales de la résistance aux médicaments.

Les recherches du professeur Fafard et d’autres chercheurs soulignent le fait que la résolution de cet enjeu exigera une concertation scientifique et l’adoption d’un plan mondial fondé sur un éventail d’expertises.

Les deux études de cas mettent en lumière un dilemme contemporain beaucoup plus vaste qui oppose les aspirations universelles de la science aux intérêts nationaux et qui rappelle la nécessité de maintenir le délicat équilibre entre la coopération mondiale et les priorités individuelles des États-nations.

Résumé de la période 2024-2025

Au cours de l’année universitaire 2024-2025, le partenariat entre l’Université d’Ottawa et l’Ambassade de France au Canada a été extrêmement fructueux, la Chaire de recherche en diplomatie scientifique ayant produit une multitude d’événements, de littérature et de recommandations. Ce réseau de recherche, conscient des enjeux globaux qui affectent actuellement la recherche et ses implications politiques, s’est concentré sur plusieurs axes d’étude. Tout d’abord, la Chaire a exploré l’augmentation des échanges académiques entre les chercheurs en sciences sociales et les scientifiques appliqués afin de provoquer des analyses multidisciplinaires sur le thème de la diplomatie scientifique.  Deuxièmement, elle a lancé des projets de recherche examinant spécifiquement les efforts diplomatiques liés à la santé, tout en combinant l’expertise des diplomates et des scientifiques pour examiner les structures de gouvernance internationale luttant contre l’augmentation inquiétante de la résistance aux antibiotiques. Troisièmement, la Chaire a renforcé l’association du Canada avec les réseaux européens de subventions à la recherche, y compris le géant du financement Horizon Europe, étant donné le pivot scientifique du Canada qui s’éloigne de la recherche dirigée par les Américains sous l’administration Trump, et de l’adhésion du Canada en 2024 à Horizon Europe, permettant une participation et une influence canadiennes accrues sur les opérations scientifiques d’Horizon Europe. Enfin, la Chaire de recherche a engagé des partenaires et des parties prenantes à construire un réseau de coopération plus permanent entre les chercheurs, les scientifiques et les diplomates analysant l’influence croissante de la diplomatie scientifique, suggérant une coopération renforcée et une recherche future sur la gouvernance de l’IA comme un sujet possible que le réseau de recherche pourrait poursuivre à l’avenir, à mesure qu’il devient plus formel et officiel. 

Événements

  • En mai 2024, le professeur Fafard a participé à une table ronde intitulée « La diplomatie scientifique dans l’espace francophone » à l’ACFAS (Association canadienne-française pour l’avancement des sciences).
  • En mai 2024, alors que le professeur Griset était en visite à l’Université d’Ottawa, le CÉPI a organisé un séminaire sur la diplomatie scientifique afin de présenter les principales conclusions du projet InsSciDE d’Horizon 2020 « Inventer une diplomatie scientifique partagée pour l’Europe ».
  • En mai 2024, la Chaire de recherche en diplomatie scientifique a organisé un dîner de travail entre les attachés diplomatiques pour les sciences de plusieurs ambassades européennes, des acteurs gouvernementaux d’Affaires mondiales Canada et du Conseil national de la recherche du Canada, et des universitaires de l’Université d’Ottawa.
  • En octobre 2024, les professeurs Fafard et Griset ont accueilli le professeur Adam Chati de l’Université de Casablanca et Aziza Manouni de l’Université catholique de Louvain, pour discuter de l’élargissement des liens scientifiques entre le Maroc, la France et le Canada.
  • En octobre 2024, le professeur Griset a participé à un événement des National Institutes of Health en partenariat avec l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale (INSERM) à Bethesda, aux États-Unis. Le séminaire « Transatlantic Circulation – Comparing the Human Genome Project with the Exposome Program : an Historical Perspective Seminar » a permis de comparer la recherche génétique sur le génome humain à la recherche future sur l’exposome (empreinte environnementale d’un individu).
  • En février 2025, le professeur Griset a participé à l’événement « Science Diplomacy and Transatlantic Health Diplomacy : A Long Term Perspective » à Paris.
  • En février 2025, le professeur Fafard a participé à la série de dialogues d’action portant sur les grands défis de l’Institut de recherche sur la science, la société et la politique publique (ISSP), en donnant une conférence intitulée « La pratique de la diplomatie scientifique dans un monde géopolitique de plus en plus fragmenté et incertain : un dialogue d’action sur les grands défis, présenté par Confluences ». La présentation a examiné les implications de l’instabilité géopolitique actuelle pour la diplomatie scientifique internationale. La présentation et la discussion qui a suivi ont porté sur la place de la diplomatie scientifique dans un contexte géopolitique en mutation, le rôle des universités dans la diplomatie scientifique, l’interaction entre la science et la confiance du public, et la position du Canada dans la diplomatie scientifique mondiale.
  • En avril 2025, l’Université d’Ottawa et l’Ambassade de France au Canada ont organisé un événement intitulé « La diplomatie scientifique, au cœur des relations entre le Canada, la France, et l’Europe » afin de réfléchir aux deux premières années de la Chaire de recherche en diplomatie scientifique et de planifier l’avenir, avec des tables rondes impliquant des personnalités de l’Université de la Sorbonne, de la Commission européenne et du Bureau de la Conseillère scientifique en chef du Canada.

Blogs